Hicham Temsamani

Hicham Temsamani est ingénieur biomédical avec une solide expérience internationale dans le secteur de la santé. Après un parcours au Centre National d’Études Spatiales (CNES), puis chez Panasonic, Cisco, Cardinal Health, AWS et Google Cloud, il fonde H.B.T Group France, son cabinet de conseil stratégique spécialisé dans la transformation numérique des organisations de santé. Engagé dans l’innovation et la prévention, il organise également des conférences scientifiques dédiées à la médecine préventive et à la longévité.

Published On: 13/10/2025

Santé populationnelle

La santé populationnelle observe des groupes entiers, qu’ils soient définis par leur territoire, leurs caractéristiques démographiques ou leur état de santé, afin d’identifier les individus à risque ou ceux qui ont été exclus des dépistages et programmes de prévention.

Ces initiatives s’attaquent également aux déterminants sociaux de la santé, tels que le revenu, l’éducation, l’environnement et l’accès aux soins. En mettant en lumière les inégalités entre groupes, elles ouvrent la voie à une réduction des disparités dans la population.

D’un point de vue économique, les programmes de santé populationnelle contribuent à maîtriser les dépenses de santé en prévenant les hospitalisations évitables et en améliorant la prise en charge des maladies chroniques.

En résumé, la santé populationnelle permet de maintenir les individus en meilleure santé plus longtemps en combinant prévention, détection des risques grâce aux données, coordination des soins et prise en compte des besoins médicaux autant que sociaux.

Médecine préventive et de longévité

La médecine préventive et de longévité s’impose comme l’une des révolutions médicales majeures des décennies à venir. Elle apporte une réponse stratégique aux défis croissants de santé publique.

En intégrant la génomique, la biotechnologie et la médecine régénérative, cette approche permet une prise en charge ultra-personnalisée : identifier les risques précocement, adapter les traitements et régénérer les tissus endommagés par le vieillissement.

La médecine préventive personnalisée moderne, très proche de la médecine de précision, cherche à adapter prévention, diagnostic et traitement à la biologie unique de chaque individu. Elle s’appuie sur la génétique, les biomarqueurs, l’environnement et les données liées au mode de vie pour guider les décisions.

Passage à l’échelle de la médecine préventive et de longévité

La prochaine étape consiste à déployer la médecine préventive et de longévité à grande échelle. Pour y parvenir, deux piliers sont essentiels : les programmes de santé populationnelle et la médecine fondée sur la valeur (value-based care).

La santé populationnelle permettra de cartographier les besoins médicaux selon les territoires et les groupes, en intégrant les déterminants sociaux dans une stratégie globale.

La value-based care alignera les professionnels de santé sur des modèles qui récompensent la qualité, les résultats et la maîtrise des coûts plutôt que le volume d’actes réalisés.

Les données déjà utilisées dans les programmes actuels de santé populationnelle serviront, grâce à une puissance de calcul accrue et sur des horizons temporels plus longs, de socle à la médecine préventive et de longévité. Cela nécessitera des plateformes d’interopérabilité robustes, déployées à grande échelle, dotées d’une sécurité renforcée et conformes aux réglementations européennes.

La technologie comme fondation

Les technologies numériques accélèrent cette transformation, rendent l’innovation accessible au plus grand nombre et ouvrent la voie à un système de santé moderne, intégré et efficace. Ce système est centré sur la prévention, la détection précoce et une prise en charge durable et personnalisée tout au long du parcours de santé.

Au cœur de cette transformation se trouvent les données de santé numériques. Elles sont à la fois le contenu et le contenant du système moderne de santé : la colonne vertébrale des hôpitaux, cliniques et structures de proximité, le jumeau numérique du patient, et l’outil quotidien des professionnels de santé.

Les données de santé alimentent le progrès scientifique et, avec l’aide de l’IA, ouvrent d’immenses perspectives pour la recherche, l’innovation, le diagnostic, le traitement et l’optimisation des coûts.

Le défi européen

En Europe, et particulièrement en France, nous avons pris du retard dans la course au big data et ne sommes pas en tête sur le smart data ni dans l’application de l’IA à la santé. Combler cet écart avec les nations les plus avancées exige une approche pragmatique, notamment en matière de stratégie cloud.

Il nous faut concilier les préoccupations légitimes de sécurité et de souveraineté avec le besoin d’innovation et de rapidité de déploiement. Toutes les données de santé ne doivent pas nécessairement être stockées dans des clouds souverains, ni tous les services confinés à ces environnements. Une solution plus efficace pourrait résider dans une stratégie multi-cloud, reposant largement sur des solutions open-source et intégrant les plateformes d’interopérabilité les plus performantes disponibles aujourd’hui.

Un déficit critique que l’Europe doit combler, en particulier dans la médecine préventive et de longévité, est l’usage des grands modèles de langage (LLMs), entraînés principalement sur des jeux de données de santé non européens. Pour garantir la pertinence, la confiance et la souveraineté, il devient urgent de développer la capacité à entraîner ces modèles sur des données de santé locales. Cela nécessitera probablement la même stratégie multi-cloud, appuyée par des plateformes d’interopérabilité puissantes, afin de permettre des environnements d’entraînement sécurisés, à grande échelle et conformes aux réglementations.